Modification du contrat de travail – baisse de salaire – motifs réels et sérieux (oui) – licenciement abusif (non)
D’après les dispositions des articles L.121-7 alinéa 3 et L.124-5 (2) alinéa 1er du code du travail, la résiliation qui découle du refus du salarié d’accepter la modification de son contrat de travail constitue un licenciement et pour être régulier, la modification du contrat de travail doit être fondée sur une cause réelle et sérieuse.
S’il peut y avoir pluralité de motifs invoqués par l’employeur pour fonder la modification substantielle du contrat de travail, les motifs invoqués par l’employeur doivent correspondre à la vérité et être établis, partant réels. Ces mêmes motifs doivent présenter une certaine gravité afin d’être considérés comme sérieux.
En l’espèce, il ressort des développements repris ci-avant que la SOC1.) a reproché à l’appelant de ne pas avoir su s’intégrer dans l’équipe de C.) et d’avoir eu des contacts difficiles avec les clients, ce qui a impliqué un reclassement interne vers le 15 août 2011, au sein d’un des deux départements de comptabilité/fiscalité.
Ce reclassement interne est certes intervenu seulement un mois après l’entrée en vigueur (le 15 juillet 2011) du contrat de travail à durée indéterminée signé le 9 mai 2011, mais il ressort cependant des déclarations du témoin D.), responsable du service Secrétariat Social, que C.) lui avait signalé, dès le début, les difficultés qu’elle avait rencontrées dans sa collaboration avec A.), son manque de volonté d’apprendre, son absence d’écoute quant aux consignes et conseils qu’il avait reçus et son contact difficile avec les clients. Comme un entretien avec A.) début août 2011, avant le départ en congé de C.), n’avait pas été suivi d’effets, C.) a eu un entretien avec B.) et E.) à l’issue duquel il avait été convenu de changer A.) de service.
Même s’il ressort des déclarations du témoin E.) qui dirigeait le service dans lequel A.) avait été muté que «… sur le plan relationnel et au niveau de la précision du travail et de son implication, tout s’est toujours bien passé…. », il n’en demeure pas moins que les problèmes relevés par la SOC1.) à l’encontre de A.) sur le plan relationnel sont réels, sur base des motifs retenus par le jugement du 25 février 2016 que la Cour faits siens.
Il en est également ainsi en ce qui concerne le reproche formulé par la SOC1.) en relation avec le rendement professionnel de A.).
En effet, la SOC1.) a relevé dans la lettre du 30 mai 2013, page 3 alinéa 2, que « Force a été de constater que malgré votre souci de bien faire et une intégration cette fois-ci sans heurts, les temps consacrés aux travaux (du simple au double) n’étaient pas en adéquation avec les budgets arrêtés dans les lettres de mission de nos clients… ».
Cette problématique a été confirmée par les déclarations de E.) lors de l’enquête, ce dernier ayant déclaré que « …le temps dédié aux dossiers était trop important par rapport au budget alloué au dossier par les clients… », et encore que « un gestionnaire traite en moyenne entre 30 à 40 dossiers, M. A.) n’en traitait qu’une dizaine jusqu’à la fin de la relation de travail. Sa méthode de travail n’était pas en accord avec le budget alloué et respecté par le précédent collaborateur…. ».
Il convient à cet égard de mettre en exergue que A.) avait été engagé comme un comptable bénéficiant d’une expérience professionnelle de plus de 20 ans, d’après son propre curriculum vitae.
L’enquête n’a donc fait que confirmer les problèmes relationnels et le manque de rentabilité de l’appelant et elle n’a pas révélé que ces problèmes ont trouvé leurs motifs dans les remarques de l’appelant au sujet du suivi des deux dossiers clients selon lesquelles ces dossiers auraient été de nature à nécessiter un investissement en temps plus conséquent.
Les reproches tels que formulés par la SOC1.) sont à considérer comme réels et sérieux sur base des motifs repris ci-avant, justifiant dès lors la modification substantielle du contrat de travail de A.) se traduisant par une baisse de son salaire mensuel brut.
Le licenciement avec préavis intervenu suite au refus de A.) de ne pas accepter cette modification, est dès lors régulier et justifié.
Il s’en suit que les demandes d’indemnisation de A.) ne sont pas fondées.
Les jugements entrepris du 5 mars 2015 et du 25 février 2016 sont dès lors à confirmer.
Etant donné la décision à intervenir, les demandes en réparation du préjudice matériel et moral de l’appelant ne sont pas fondées et doivent partant être rejetées.
La demande de l’appelant en allocation d’une indemnité de procédure basée sur les dispositions de l’article 240 du Nouveau code de procédure civile est à rejeter au vu de l’issue du litige.
Etant donné qu’il ne parait pas inéquitable de laisser à charge de la SOC1.) l’intégralité de frais exposés par elle et non compris dans les dépens, la demande y afférente est à déclarer non fondée. (C.S.J., 19/12/2019, 43568).