LICENCIEMENT AVEC EFFET IMMEDIAT – INJURES – CLAUSE D’ESSAI (validité) – ABSENCE INJUSTIFIEE

Les moyens de l’appelant seront toisés dans l’ordre dans lequel celui-ci les a présentés.

Aux termes de l’article L.121-5 du Code du travail, la période d’essai peut s’étendre sur six mois, lorsque le salarié est titulaire d’un certificat d’aptitude technique et professionnelle (CATP).

Lorsque la personne qui entend se lier par un contrat de travail, se prévaut d’une certaine qualification professionnelle, l’employeur est en droit de se fier aux déclarations de son salarié et n’a pas à effectuer des vérifications afin de s’assurer de leur véracité, eu égard notamment au principe de bonne foi que l’article 1134, alinéa 3 du Code civil impose aux parties, non seulement dans la phase d’exécution du contrat, mais aussi dès le stade précontractuel, en exigeant de leur part qu’elles négocient loyalement (cf. Cass. 3e civ. 18.12.2012, n° 11-28251, RTD civ. 2013.109, obs. B. Fages).


En l’espèce, l’appelant s’est prévalu, dans son curriculum vitae remis à l’intimée (cf. pièce n° 6 de la farde I de l’intimée), d’un CATP, obtenu en 1993 au lycée technique d’Esch-sur-Alzette, et d’une expérience professionnelle de dix ans en tant que monteur sanitaire.

Dans ces conditions, l’intimée était dispensée de vérifier l’exactitude de la qualification affirmée par l’appelant et était fondée à insérer dans le contrat de travail en cause, une clause d’essai portant sur une période de six mois.

Le moyen de l’appelant tendant à l’annulation, sinon à la réduction de la période d’essai, doit partant être rejeté.

La présence sur le lieu de travail, aux heures prévues dans le contrat de travail, constitue pour le salarié une obligation de résultat.

Lorsque le salarié est empêché de se présenter sur son lieu de travail ou de rester sur son lieu de travail pour raison de santé, il doit en avertir son employeur, dans les conditions définies aux deux premiers paragraphes de l’article L.121-6 du Code du travail qui se lisent comme suit :

« Le salarié incapable de travailler pour cause de maladie ou d’accident est obligé, le jour même de l’empêchement, d’en avertir personnellement ou par personne interposée l’employeur ou le représentant de celui-ci.

L’avertissement visé à l’alinéa qui précède, peut être effectué oralement ou par écrit.


Le troisième jour de son absence au plus tard, le salarié est obligé de soumettre à l’employeur un certificat médical attestant son incapacité de travail et sa durée prévisible. »

Le paragraphe (3) de ce même article ajoute que « l’employeur averti conformément au paragraphe (1) ou en possession du certificat médical visé au paragraphe (2) n’est pas autorisé, même pour motif grave, à notifier au salarié la résiliation de son contrat de travail. »

Pour bénéficier de la protection contre le licenciement prévue par le paragraphe (3) cité ci-dessus, le salarié doit avoir rempli les conditions prévues par les deux premiers paragraphes de ce même article.

Tant que le salarié n’a pas satisfait à l’obligation d’information définie ci-dessus, celui-ci n’est pas protégé et l’employeur peut lui notifier son licenciement ou, le cas échéant, sa convocation à un entretien préalable (article L.121-6 (4) du Code du travail).

Les deux informations susmentionnées doivent être parvenues à l’employeur, autrement dit, avoir été reçues par ce dernier dans les délais prévus par l’article L.121-6 du Code du travail.

En cas de contestation, il appartient au salarié d’en rapporter la preuve.

Ce n’est que grâce à ces informations que l’employeur saura qu’il ne doit plus compter sur ce salarié jusqu’à obtention de l’information contraire et que l’employeur sera en mesure de pourvoir à son remplacement ou aux mesures qui
s’imposent du fait de son absence.

D’autre part, face au risque d’un licenciement abusif comportant indemnisation du salarié, l’employeur doit impérativement être informé de ce que le salarié se trouve dans une période de protection entraînant une interdiction de licencier (cf. Cour d’appel, III, 11.10.2007, n° du rôle 31 390).

En ce qui concerne plus particulièrement la seconde obligation d’information, il incombe dès lors au salarié de faire en sorte que le certificat médical en question parvienne à son employeur, au plus tard le troisième jour de l’absence du salarié, et d’en apporter la preuve en cas de contestation (cf. Cour d’appel, III, 15.01.2015, n° du rôle 40 301).

Il ne suffit donc pas que le salarié établisse avoir posté ledit certificat ou déposé celui-ci dans la boîte aux lettres de l’employeur, le troisième jour de son absence, puisque cette circonstance n’implique pas qu’il ait été reçu par l’employeur le même jour (cf. Cour d’appel, III, 11.10.2007, n° du rôle 31 390).

Il importe de souligner, en ce qui concerne cette deuxième obligation d’information, que l’emploi des termes « soumettre à l’employeur » à l’article L.121-6 (2) requiert que l’employeur soit effectivement mis en possession du
certificat médical, au plus tard le troisième jour de l’absence.

En cas de prolongation de l’incapacité, le salarié devra à nouveau satisfaire à ces deux obligations (cf. Cour d’appel, VIII, 20.11.2008, n° du rôle 33 174).

En l’espèce, l’appelant était absent pour cause de maladie à partir du 4 octobre 2017 et n’a presté que vingt jours de travail.

Il affirme, attestation à l’appui, et offre de prouver par témoin, en ce qui concerne les périodes d’incapacité de travail du 15 au 20 mars 2018 et du 21 au 23 mars 2018, que « le jour même de la prolongation de maladie », il aurait informé
l’intimée de ladite prolongation par SMS, tandis que son épouse aurait déposé, « à cette même date », le certificat dans la boîte aux lettres de l’intimée.

L’appelant se limitant à soutenir et à offrir en preuve l’envoi d’un SMS contenant l’information de la prolongation et le dépôt dans la boîte aux lettres de l’intimée du certificat médical y relatif, il reste en défaut de prouver ou d’offrir en preuve que son ancien employeur aurait reçu l’information de la prolongation de l’incapacité de travail, le jour même, et qu’il aurait reçu, au plus tard le troisième jour de la prolongation, le certificat médical l’attestant.

De plus, l’appelant ne précise pas l’heure à laquelle ces informations auraient été adressées à l’intimée, de sorte qu’il est possible que cet envoi et/ou ce dépôt ai(en)t été effectué(s) à une heure tardive, à laquelle les locaux de l’intimée étaient déjà fermés.

Il est relevé à cet égard que l’article 10 du contrat de travail (cf. pièce n° 1 de la farde I de l’appelant) stipule de surcroît que « le salarié incapable de travailler pour cause de maladie ou d’accident s’oblige, le jour même de l’empêchement, le plus tôt possible et de préférence avant 8 heures, d’en avertir l’employeur ou son supérieur », ce qui ne faisait que renforcer conventionnellement l’obligation d’information ponctuelle à charge de l’appelant et met davantage en relief son inobservation dans le cas présent. L’attestation et l’offre de preuve par témoin de l’appelant sont donc à rejeter pour défaut de pertinence.

En conséquence, il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a retenu que l’appelant ne bénéficiait pas, au moment de la résiliation de son contrat de travail, de la protection légale prévue par l’article L.121-6 précité du Code du travail.

C’est à bon droit et pour des motifs que la Cour fait siens que la juridiction du premier degré a considéré que le libellé de la lettre du 21 mars 2018 remplit, dans son ensemble, l’exigence de précision édictée à l’article L.124-10 (3) du Code du travail.

Aux termes de l’article L.124-10 (6) alinéa 1er du Code du travail, l’employeur ne peut pas fonder un licenciement sur des faits dont il a pris connaissance plus d’un mois auparavant (« au-delà d’un mois à compter du jour où la partie qui l’invoque en a eu connaissance »).

C’est à tort que l’appelant soutient que SOC 1) aurait, au regard de cette même disposition, été forclose à motiver le licenciement immédiat de l’appelant, en date du 21 mars 2018, par l’incident du 20 octobre 2017.

En effet, le délai d’un mois, prévu par l’article L.124-10 (6) alinéa 1er du Code du travail, est suspendu lorsque l’employeur n’est pas en droit de licencier parce que le salarié bénéficie d’une protection spéciale contre le licenciement, notamment en cas d’incapacité de travail pour cause de maladie.

Ce délai recommence à courir à la date à laquelle l’employeur recouvre le droit de licencier.

Il s’en déduit qu’en l’espèce, ce même délai a été suspendu pendant toute la durée de l’incapacité de travail de l’appelant et que l’intimée était en droit de résilier le contrat de travail avec effet immédiat, au terme de la période couverte par la protection spéciale contre le licenciement, motif pris des propos tenus par l’appelant en date du 20 octobre 2017, ainsi que la juridiction du premier degré l’a décidé à bon droit.

L’article L. 124-10 (2), al 1er du Code du travail dispose que le licenciement avec effet immédiat exige un fait ou une faute « qui rend immédiatement et définitivement impossible le maintien des relations de travail ».

Il ressort du procès-verbal de police n° 11342/2017 daté du 28 octobre 2017 (cf. pièce n° 4 de la farde I de l’intimée), et plus particulièrement de la déposition de l’appelant que celui-ci a reconnu avoir traité l’administratrice déléguée de la société intimée de « poufiasse ».

Il en ressort, d’autre part, que celle-ci s’était, auparavant, limitée à rappeler à l’appelant ses obligations légales et contractuelles, en cas de survenance ou de prolongation d’une incapacité de travail pour cause de maladie.

L’emploi par l’appelant de ce terme hautement injurieux à l’adresse de son employeur, qui plus est dans des circonstances qui n’étaient aucunement de nature à justifier l’emportement de l’appelant, constitue, dans son chef, une faute ayant rendu immédiatement et définitivement impossible les relations de travail, au sens de l’article L. 124-10 (2), al 1er précité du Code du travail.

C’est donc à juste titre que les juges de première instance ont considéré que cette faute grave justifiait, à elle seule, le licenciement avec effet immédiat.

Il est permis d’ajouter, à titre superfétatoire, d’une part, que l’appelant a méconnu son obligation légale et contractuelle d’informer son employeur de son absence pour cause de maladie, dans les conditions requises, de sorte que ce dernier était en droit de lui reprocher d’être « en absence injustifiée depuis le 15 mars 2018 », et d’autre part, que cette absence prolongée injustifiée est pareillement constitutive d’une faute grave justifiant la résiliation du contrat de travail avec effet immédiat.

Il suit de là que le jugement dont appel est à confirmer en ce qu’il a dit justifié la résiliation avec effet immédiat du contrat de travail et débouté A de sa demande. (C.S.J., 20/05/2021, numéro CAL-2020-00198 du rôle).