Insubordination – ton déplacé – faute – licenciement avec préavis abusif (non)
La Cour constate qu’il résulte de l’avenant au contrat de travail du 14 juin 2010 que si jusqu’à cette date, A était employé « à raison de 16h/semaine, de 1h00 à 4h00 du lundi au jeudi, de 1h00 à 3h30 le vendredi et de 1h00 à 3h00 un samedi sur deux et un dimanche sur quatre, en tenant compte de deux jours de repos non payés par semaine », cet horaire avait été modifié à partir du 14 juin 2010, l’avenant prévoyant désormais une durée de travail et un horaire « à raison de 20h/semaine de 1h00 à 5/00 heures du lundi au dimanche en tenant compte de deux jours de repos non payés par semaine ».
Ces modalités furent maintenues par l’avenant du 1er octobre 2013 suivant lequel A fut désigné chef d’équipe pour le chantier S3 gare de X. Cet horaire fut également maintenu par le dernier avenant au contrat de travail du 1er avril 2016 par lequel la société S1 a repris A, avec son ancienneté remontant au 2 mars 2010, et conclu avec lui un nouveau contrat de travail à durée indéterminée à partir du 1er avril 2016.
Il n’est dès lors pas établi que les prétentions de A de pouvoir travailler avec des majorations de salaire, comme par le passé, les dimanches, respectivement les jours fériés, s’imposaient à l’employeur.
Il s’y ajoute que A n’a pas seulement exprimé son mécontentement dans le prédit message.
A l’instar des premiers juges, la Cour constate que A a fait usage d’un ton, non pas rude ou rugueux, mais défiant à l’égard de sa supérieure hiérarchique, l’invitant à le mettre au repos pendant la moitié du mois si « ça vous amuse tant que ça !!! », propos qui traduisent en effet la grave mésentente qui s’était installée entre parties.
Le deuxième message envoyé le 1er mai 2016 à 16h06 par A à sa supérieure hiérarchique est de la teneur suivante :
« Et pour vous dire monsieur B était tous seul hier au chantier est ce que c est normal sa ? Il ma prevenue et je lui est dit de ne pas travailler donc vos trains n’ont pas était fait ! Il est hors de question qu’une personne soit seul sur le chantier et Vos planings sont tres mal organiser j ai jamais vue sa ».
A se plaint dans ce message du fait que B était tout seul sur le chantier pendant la nuit du 30 avril au 1er mai 2016 et qu’« il est hors question qu’une personne soit seul sur le chantier ». Il conteste cependant avoir interdit quoique ce soit à son collègue de travail, affirmant lui avoir simplement expliqué qu’il était dangereux de travailler seul dans la nuit, notamment en cas de blessure, malaise ou d’agression.
La société S1, au contraire, fait valoir qu’il y a lieu d’apprécier ce message dans le contexte des faits dans lequel il s’est produit pour apprécier le comportement du salarié qu’elle qualifie d’acte d’insubordination. Elle fait valoir que A, bien qu’averti de l’importance du respect des horaires de travail, avait déchargé un collègue de travailler sans en informer quiconque, de sorte qu’aucune prestation
n’avait été effectuée durant la nuit du 1er mai 2016. En sa qualité de chef d’équipe, il lui aurait, au contraire, appartenu d’aviser ses supérieurs hiérarchiques à l’effet de dépêcher un autre ouvrier sur les lieux.
La Cour constate que suivant les termes univoques du message que A a envoyé à sa supérieure hiérarchique selon lesquels « (…) je lui est dit de ne pas travailler donc vos trains n’ont pas était fait ! », que A a instruit un ouvrier de ne pas accomplir son travail.
Force est de constater que ce message, outre son ton déplacé, s’inscrit également dans le contexte d’un mécontentement grandissant de A face aux plannings établis par ses employeurs.
La Cour relève finalement que ces messages ont eu lieu deux jours après que le client S3 avait adressé une réclamation écrite à la société S1 se plaignant du fait que l’équipe de nettoyage « qui utilise le 1er étage du bâtiment PH laisse ouverts les fenêtres du bâtiment », que « le WC en question était dans un état insalubre (dégueulasse et cigarettes) » et que « l’équipe de nettoyage fume à l’intérieur de l’immeuble ».
Cette réclamation quant à l’état des locaux utilisés par l’équipe de nettoyage laisse encore apparaître l’attitude désinvolte de A, auquel il appartenait en tant que chef d’équipe de prendre les mesures nécessaires pour y remédier, ou d’en aviser le cas échéant ses supérieurs hiérarchiques, même s’il n’était pas lui-même fumeur.
Il découle des considérations qui précèdent et sans qu’il n’y ait lieu d’examiner plus avant les reproches tirés des non-respects répétés par A de son horaire de travail, que les faits ci-avant examinés ont nécessairement ébranlé la confiance que l’employeur doit avoir dans son salarié et dans sa collaboration future, ce à plus forte raison qu’il s’agissait de l’un de ses chefs d’équipe.
Au vu de la gravité des faits en cause, il y partant lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a déclaré le licenciement avec préavis justifié et déclaré non fondées les demandes en indemnisation de A. (C.S.J., 03/05/2018, CAL-2017-00058)