Démission avec effet immédiat – retards de paiement de salaire – forclusion

Ces retards de paiement du salaire constituent des fautes répétitives dans le temps et le dernier retard de paiement se situe dans le mois précédant la résiliation du contrat par A. C’est donc à juste titre que la juridiction de première instance a rejeté le moyen tiré de la forclusion de l’article L.124-10(6) du Code du travail. En effet, même si le dernier retard n’était que de quelques jours, il reste que la partie qui résilie le contrat de travail pour motif grave peut invoquer, outre les faits se situant dans le délai légal d’un mois, encore des faits antérieurs à l’appui de ceux-ci et il appartient à la juridiction de travail d’apprécier si tous ces faits pris dans leur ensemble sont d’une gravité suffisante pour justifier la résiliation avec effet immédiat du contrat de travail. (C.S.J., 1/03/2018, 44350)

A l’appui de son appel la SA S1 fait valoir que le seul fait intervenu dans le délai de l’article L.124-10 (6) du Code du travail est le paiement du salaire du mois d’août en date du 2 septembre 2015, ce qui ne justifierait pas une démission sans préavis. Le véritable motif de la démission de la salariée résiderait dans le refus de l’employeur d’augmenter la rémunération de A, soit de valoriser l’autorisation d’établissement que cette dernière avait mis à sa disposition. L’appelante explique que A était la gérante administrative de la société et était, par l’intermédiaire de sa société S3, également en relation de partenariat avec la SA S1. Elle n’aurait jamais manifesté un quelconque reproche quant au léger retard de paiement du salaire d’août 2015. Elle aurait, par contre, démissionné en même temps qu’elle a résilié la convention de partenariat entre les sociétés S1 et S3.

Les retards de paiement de salaires antérieurs au congé de maternité de A à partir du mois de novembre 2014 auraient été convenus d’un commun accord, étant donné que l’intimée désirait avoir une participation dans le capital de la société S1 et utiliser à ces fins le montant de ses salaires. Le paiement des salaires d’avril à juin 2015 aurait été suspendu en raison du fait que l’intimée ne s’était pas présentée à son poste de travail pendant la période du 20 avril 2015 au 12 juin 2015.

La salariée, par contre, fait plaider que les juges de première instance se sont à juste titre référés aux fautes répétitives de l’appelante dont la dernière serait intervenue dans le mois de la démission. Les retards de paiement à la base de sa démission justifieraient une résiliation du contrat de travail sans préavis. La résiliation de la convention de partenariat aurait également été motivée par un défaut de paiement de différents montants redus. Aux termes de l’article L.221-1 le salaire « est payé chaque mois, et ce au plus tard le dernier jour du mois de calendrier afférent ». Il en suit que le non-paiement des salaires, respectivement les retards de paiement systématiques et répétés par l’employeur des salaires constituent une faute grave dans son chef rendant la démission du salarié avec effet immédiat justifiée, dès lors que l’obligation principale de l’employeur demeure celle de payer à temps les salaires en contrepartie du travail presté par son salarié. Un salarié a en effet droit à une stabilité financière et dès lors droit au paiement intégral de ses salaires à la fin de chaque mois.

Il résulte des pièces versées en cause que le salaire de l’intimée était systématiquement versé dès 2013 de façon irrégulière et avec retard.

Ces retards de paiement du salaire constituent des fautes répétitives dans le temps et le dernier retard de paiement se situe dans le mois précédant la résiliation du contrat par A. C’est donc à juste titre que la juridiction de première instance a rejeté le moyen tiré de la forclusion de l’article L.124-10(6) du Code du travail. En effet, même si le dernier retard n’était que de quelques jours, il reste que la partie qui résilie le contrat de travail pour motif grave peut invoquer, outre les faits se situant dans le délai légal d’un mois, encore des faits antérieurs à l’appui de ceux-ci et il appartient à la juridiction de travail d’apprécier si tous ces faits pris dans leur ensemble sont d’une gravité suffisante pour justifier la résiliation avec effet immédiat du contrat de travail. (C.S.J., 1/03/2018, 44350)