Contrat de travail – éléments constitutifs – charge de la preuve – compétence du tribunal de travail.
A l’appui de son appel A, qui conteste avoir convenu avec B d’effectuer seulement un stage non rémunéré, explique avoir exécuté pendant la période du 22 février 2016 au 30 avril 2016 des tâches ordonnées par B, sous son contrôle et sa subordination.
Elle aurait ainsi eu pour fonction :
– d’assister principalement B au cours du traitement des patients du cabinet,
– d’assister en l’absence de B C, hygiéniste dentaire, au cours du traitement des patients du cabinet,
– de vérifier et de superviser en l’absence de B le bon déroulement des activités du cabinet dentaire (surtout au moment des consultations de prévention et des traitements hygiéniques pratiqués par les hygiénistes dentaires),
– de créer des présentations « PowerPoint » des patients du cabinet dentaire, avec des photos fournies par B,
– de préparer les listes de matériaux du cabinet dentaire avec les assistantes D et E,
– de créer des bannières publicitaires pour les cours proposés par « l’Académie »,
– d’aller, en cas d’urgence, à la poste pour l’envoi de courriers et/ou paquets importants.
Ces faits seraient établis par les pièces versées en cause, à savoir les échanges de courriels avec B, les plannings et les attestations testimoniales.
Ses horaires auraient été fixés à 40 heures par semaine du lundi au vendredi. Elle aurait été présente aux réunions matinales journalières. Pour autant que de besoin, elle demande la communication de tous les plannings pendant la période litigieuse.
B soutient, par contre, qu’en attendant l’homologation de son diplôme au Luxembourg, elle avait proposé à A un stage d’observation dit « hospitation » sans aucune rémunération jusqu’à son autorisation de pratiquer au Luxembourg afin de lui permettre de se familiariser avec le métier de dentiste au Luxembourg et d’être opérationnelle dès l’obtention des autorisations requises.
Elle renvoie à ses propres pièces pour établir sa version des relations entre parties et notamment à la déclaration d’intention aux fins de définir leurs relations de collaboration dès l’obtention de son numéro de code en tant que prestataire de soins de santé. Dans le planning versé par A cette dernière figurerait seulement ensemble une assistante alors qu’il s’agissait de la faire participer à certains rendez-vous dans le cadre de son « hospitation ».
B ajoute que les attestations versées par l’appelante précisent qu’elle avait pour mission de superviser les assistantes dentaires en cas d’absence et dans son courrier le collège médical écarterait tout statut d’assistant dentaire.
L’intimée ajoute qu’avant le 20 juillet 2016, A n’a jamais fait état d’un contrat de travail et n’a pas réclamé de salaire.
B conteste également que l’appelante ait été soumise à un horaire de 40 heures par semaine. A se serait en outre occupée de ses affaires privées au cabinet dentaire.
Les juridictions du travail sont des juridictions d’exception qui ne peuvent connaître que des affaires qui leur sont réservées par la loi et plus particulièrement par l’article 25 du NCPC.
Il y a dès lors lieu d’examiner si les parties sont liées par un contrat de travail tel que défini par la jurisprudence suivant laquelle le contrat de travail est la convention par laquelle une personne s’engage à mettre son activité à la disposition d’une autre, sous la subordination de laquelle elle se place, moyennant rémunération.
Le lien de subordination est le critère essentiel du contrat de travail qui est caractérisé par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements d’un subordonné.
La subordination trouve, en effet, sa véritable expression juridique dans les prérogatives de l’autre partie, dans le véritable pouvoir de direction que l’employeur tire de la situation instaurée et qui doit pouvoir s’exercer à tout moment d’une manière effective.
L’existence d’un contrat de travail ne dépend pas de la qualification que les parties entendent donner à leur convention, mais des conditions de fait dans lesquelles s’exerce l’activité du salarié.
Il appartient à celui qui invoque l’existence d’un contrat de travail d’en rapporter la preuve.
S’il résulte des attestations versées en cause par A qu’elle a participé aux réunions matinales du cabinet dentaire et qu’elle a effectué certaines missions lui confiées au sein du cabinet du docteur B en attendant l’obtention de son autorisation de pratiquer comme médecin dentiste au Luxembourg, il n’en résulte cependant pas qu’elle les a effectuées dans un lien de subordination.
Il résulte, par contre, des attestations versées par B que les missions confiées à A avaient essentiellement pour but de permettre à l’appelante de se familiariser avec le fonctionnement du cabinet dentaire et le système luxembourgeois de prestation et de facturation. F et C attestent encore qu’A avait pour mission de superviser les assistantes en cas d’absence du docteur B, ce que l’appelante reconnaît elle-même dans ses conclusions du 5 décembre 2017.
G a également précisé qu’A s’est occupée de ses affaires privées en utilisant son ordinateur au back-office.
Les courriels échangés entre l’appelante et le docteur B respectivement F se réfèrent à une collaboration future au sein d’une association de médecins-dentistes.
En effet, le fait qu’A a marqué, dans le cadre de sa collaboration future avec le cabinet du docteur B, son accord pour l’aider à réaliser des bannières pour une conférence, respectivement pour des cours, ne permet pas de retenir l’existence d’un contrat de travail entre l’appelante et l’intimée.
L’extrait Facebook et les plannings versés en cause ne permettent pas non plus de conclure qu’A travaillait en tant qu’assistante dentaire dans le cadre d’un contrat de travail. La demande d’A tendant à voir condamner B à verser encore d’autres plannings est dès lors à rejeter faute de pertinence.
L’appelante n’a donc établi aucun élément, suffisamment clair et non équivoque pour qualifier les relations entre parties de contrat de travail.
C’est dès lors à juste titre que le tribunal du travail s’est déclaré incompétent pour connaître de sa demande. (C.S.J., III, 28/06/2018, 45228)