Absentéisme habituel: illustration
Si le licenciement est ainsi régulier au regard de l’article L.121-6 du code du travail, il faut néanmoins encore vérifier son caractère régulier au regard de l’article L.124-11. (1) du code du travail, l’employeur devant, conformément à l’article L.124-5 (2) du code du travail, justifier de motifs réels et sérieux liés à l’aptitude ou à la conduite du salarié ou fondés sur les nécessités du fonctionnement de l’entreprise.
L’absentéisme habituel pour raison de santé peut être une cause de rupture du contrat de travail, lorsqu’il apporte une gêne indiscutable au fonctionnement de l’entreprise.
L’absentéisme habituel en tant que cause de licenciement comporte deux conditions séparées qui doivent être examinées distinctement, à savoir les absences longues ou nombreuses et répétées ainsi que la gêne considérable du fonctionnement de l’entreprise, sans certitude ou même probabilité d’amélioration dans un avenir proche. Un employeur doit pouvoir compter sur une collaboration suffisamment régulière de son personnel pour que le fonctionnement de son entreprise ne soit pas compromis. L’organisation de l’entreprise est d’autant plus déréglée que les absences se multiplient étant donné que l’employeur est mis dans l’impossibilité d’élaborer un plan de travail lorsqu’il ne peut plus compter sur une collaboration suffisamment régulière du salarié.
Il résulte d’une attestation testimoniale de Madame C.), responsable des ressources humaines auprès de la société anonyme SOC1.), que l’employeur a constaté sur une période de deux ans des insuffisances professionnelles et un manque d’hygiène dans le chef de A.) ; que des collègues de travail ont trouvé le salarié à plusieurs reprises dans un état de somnolence devant l’écran de son ordinateur ; que tel fut encore le cas le 29 août 2012 ; que, suite à cette situation, une convocation à l’entretien préalable qui devait se tenir le 4 septembre 2012 fut remise en mains propres du salarié le 29 août 2012 et A.) fut dispensé de travailler. Le jour fixé pour l’entretien préalable, l’employeur reçut de son salarié un courrier contenant deux certificats de maladie couvrant les périodes du 29 au 31 août 2012 et du 3 au 9 septembre 2012.
L’employeur a en conséquence annulé l’entretien préalable du 4 septembre 2012 et a informé son salarié du report de l’entretien dès sa reprise de travail. Par la suite l’appelant a fait parvenir à son employeur neuf certificats d’incapacité de travail rédigés par différents médecins et d’une durée variant de quatre jours à onze semaines, le dernier certificat s’étendant sur la période du 19 décembre 2012 au 8 mars 2013.
Durant toute cette période, l’employeur a été obligé de procéder à une réorganisation interne et à une redistribution des tâches entre les collaborateurs du service, nommément désignés dans l’attestation testimoniale, auquel était affecté A.), ce qui a entraîné une surcharge de travail pour ces personnes et un changement des jours de congé qui leur avaient été accordés.
Le 8 mars 2013 Madame C.) a assisté à un entretien lors duquel A.) a expliqué qu’il avait suivi une cure en Allemagne pour régler ses problèmes d’angoisse et d’addiction, qu’il était suivi par un psychothérapeute pour effectuer un sevrage médicamenteux devant durer plusieurs mois et qu’il souhaitait reprendre ses fonctions au sein de la société anonyme SOC1.). Afin de laisser à son salarié une dernière chance, l’employeur a décidé de ne pas procéder au report de l’entretien préalable, mais de maintenir les relations de travail. Il demanda à l’appelant de se présenter sur son lieu de travail en date du 11 mars 2013.
Afin d’organiser au mieux le processus de réintégration de A.), l’employeur a décidé de l’affecter pendant une période transitoire de six mois à des tâches comportant un niveau de stress limité tout en tenant compte des compétences professionnelles et personnelles du salarié. Il lui octroie un bureau proche de la Direction et organise un suivi médical avec sa médecine du travail.
En date du 13 mars 2013 vers 7.00 heures du matin, l’attestatrice est informée par sa collègue de travail qui assurait la permanence téléphonique que A.) avait prévenu qu’il était souffrant et qu’il serait dès lors absent ce jour-là. Le même jour, après avoir été contactée par une représentante de la délégation du personnel, Madame C.) explique à celle-ci que l’employeur a mis en place des mesures afin de faciliter le retour au travail de A.). Finalement, la société anonyme SOC1.) décide de mettre fin au contrat de travail existant entre parties en convoquant le salarié à un entretien préalable qui s’est tenu le 20 mars 2013.
Il découle des éléments qui précèdent que l’employeur, face aux explications lui données par le salarié lors de l’entretien du 8 mars 2013 sur son état de santé et sa capacité de retravailler, a été d’accord à lui accorder une nouvelle chance, et ce malgré le fait que l’incapacité de travail prolongée de A.) avait causé une gêne considérable au bon fonctionnement de l’entreprise.
Après seulement deux jours de présence sur son lieu de travail, A.) informe son employeur de sa nouvelle absence pour cause de maladie en date du 13 mars 2013.
C’est dès lors à bon droit et pour des motifs que la Cour adopte que le tribunal du travail a retenu que la société anonyme SOC1.), après avoir été avertie en date du 13 mars 2013 d’une nouvelle absence pour cause de maladie de A.), deux jours après la reprise de son travail suite à une maladie prolongée du 29 août 2012 au 8 mars 2013, était dans une situation où elle ne pouvait plus compter sur la collaboration suffisamment régulière de ce dernier pour les nécessités du bon fonctionnement de l’entreprise, car la prestation de travail du salarié s’annonçait aléatoire. Au vu de l’attitude de l’employeur ayant accordé au salarié une nouvelle chance pour reprendre son travail et de son souci de lui faciliter son retour au travail dans des conditions adaptées à ses compétences professionnelles et personnelles, l’offre de preuve formulée par le salarié est à écarter pour défaut de pertinence.
Dès lors le jugement entrepris ayant déclaré régulier et justifié le licenciement du 25 mars 2013 et non fondée la demande de A.) en indemnisation de ses préjudices matériel et moral est à confirmer. (C.S.J., 30/05/2016, 41917).