Une action judiciaire tardive n’exclut pas le paiement des indemnités de licenciement
Un salarié licencié avec effet immédiat en date du 8 mai 2013 a fait rédiger une requête judiciaire par son mandataire datée au 29 mai 2013 dans laquelle il conteste, entre autres, son licenciement. Selon lui, le dépôt de cette requête, adressée à son employeur respectivement à la juridiction constitue une réclamation valable permettant de prolonger le délai d’une année pour introduire son litige devant le tribunal du travail. De ce fait, le salarié a introduit une action en dommages-intérêts devant le tribunal du travail le 15 octobre 2013.
A titre liminaire, rappelons que selon les dispositions de l’article L. 123-11 (2) du code du travail, « l’action judiciaire en réparation de la résiliation abusive du contrat de travail doit être introduite auprès de la juridiction du travail, sous peine de forclusion, dans un délai de trois mois à partir de la notification du licenciement ou de sa motivation (…) Ce délai est valablement interrompu en cas de réclamation écrite introduite auprès de l’employeur par le salarié, son mandataire ou son organisation syndicale. Cette réclamation fait courir, sous peine de forclusion, un nouveau délai d’une année ». Par conséquent, à partir de la réclamation du salarié contre son licenciement intervenue dans les trois mois, ou de sa motivation, le salarié bénéficie d’un nouveau délai d’une année pour introduire une action judiciaire en réparation de la résiliation abusive du contrat de travail. Rappelons néanmoins que si l’action judiciaire n’est pas introduite dans un délai de 3 mois, ou d’un an en cas de réclamation, le salarié est forclos à demander des dommages-intérêts pour licenciement abusif. De surcroit, selon une jurisprudence fluctuante en la matière, une demande tardive du salarié entrainant la forclusion de sa demande en dommages-intérêts peut englober, outre lesdits dommages-intérêts, l’indemnité de départ, l’indemnité compensatrice de préavis et l’indemnité pour congés non pris versées au salarié licencié abusivement. Par conséquent, un salarié introduisant tardivement son action judiciaire risque de se voir opposer une irrecevabilité de l’ensemble de ses demandes.
Néanmoins, l’interprétation jurisprudentielle du délai de forclusion n’est pas uniforme, si bien que plusieurs arrêts ont déclaré recevable l’action judiciaire en paiement des indemnités de départ, de préavis et de congés non pris, à l’exception des dommages-intérêts. En l’espèce, la cour d’appel de Luxembourg confirme une nouvelle fois sa position quant à l’attribution des indemnités de licenciement en cas de demande tardive. En effet, elle énonce qu’il n’est pas prouvé que le salarié a protesté par écrit auprès de son employeur contre son licenciement avant le dépôt de sa requête le 15 octobre 2013 devant le tribunal du travail, soit plus de quatre mois après le licenciement, de sorte qu’il est forclos à intenter l’action prévue par l’article L.124-11 (2) du code du travail et sa demande en paiement de dommages et intérêts en réparation des dommages subis suite au licenciement qu’il qualifie d’abusif est à déclarer irrecevable. Néanmoins, « Il n’en demeure pas moins que si le salarié est forclos à réclamer des dommages et intérêts suite à son licenciement prétendument abusif, il est toujours habilité à réclamer le paiement de l’indemnité compensatoire de préavis, de l’indemnité de départ ainsi que les indemnités pour congés non pris dans l’hypothèse où ces indemnités n’ont pas été régulièrement payées par l’employeur. En effet, l’indemnité compensatoire de préavis est réclamée dans le contexte d’un licenciement avec préavis, de sorte qu’elle est indépendante du caractère irrégulier et abusif du licenciement, ce qui n’est pas le cas dans le contexte d’un licenciement immédiat où elle n’est due que si le licenciement est abusif. »
Cour d’appel, 22 décembre 2016, arrêt n°171/16, numéro 4220 du rôle