Licenciement économique au sein d’un groupe de sociétés.
Le chef d’entreprise est seul responsable du risque assumé, il bénéficie corrélativement du pouvoir de direction. Il décide donc seul de la politique économique de l’entreprise, de son organisation interne et des modalités techniques de son fonctionnement qu’il peut à tout moment aménager à son gré.
Partant de ce postulat, le juge ne saurait à aucun titre se substituer à lui dans l’appréciation de l’opportunité des mesures prises, quelles que soient les répercussions au regard de l’emploi.
Le chef d’entreprise est dès lors admis à opérer les mesures de réorganisation et de restructuration qu’il estime opportunes et à procéder aux licenciements avec préavis fondés sur les nécessités du fonctionnement de l’entreprise qui en sont la suite, sauf à la personne licenciée d’établir que son congédiement est sans lien avec la mesure incriminée et ne constitue pour l’employeur qu’un prétexte pour se défaire de son salarié.
L’arrêt prononcé en date du 22 décembre 2016 rendu par la 3ème Chambre de la Cour d’appel traite en partie du cas particulier du licenciement pour difficultés économiques au sein d’un groupe de sociétés. Une des questions posées était en effet de savoir si les difficultés économiques doivent s’apprécier au sein de la seule société employant le salarié ou au sein du groupe dont elle fait partie. En effet, il n’est pas rare qu’une société locale souffre d’une diminution de son chiffre d’affaire tandis que le groupe de sociétés auquel elle appartient se porte à merveille.
La jurisprudence luxembourgeoise s’est montrée très partagée.
Il a été à d’itératives reprises décidé que même si une société a une spécialisation différente ou une implantation dans un pays différent des autres sociétés du groupe, ces éléments ne suffisent pas à exclure son rattachement à un même secteur d’activité, au sein duquel doivent être appréciées les difficultés économiques.
De même il ne suffit pas dans le cadre du licenciement d’un salarié d’une société faisant partie d’un groupe de sociétés de prendre en considération seulement la situation de la société employeuse mais bien celle du groupe en entier dont il n’est pas forcément allégué qu’il rencontre des problèmes économiques.
Dans un sens contraire, il a été jugé que décider que les difficultés économiques existant au sein d’une société ne justifient pas des mesures de restructuration lorsque cette société fait partie d’un groupe qui, dans son ensemble, se porte bien, reviendrait à porter une grave atteinte au pouvoir du chef d’entreprise. Il serait en effet excessivement rigoureux d’interdire à un chef d’entreprise de fermer un établissement ou de procéder au licenciement de certains des salariés de l’établissement déficitaire au seul motif que l’entreprise dans son ensemble ou le secteur d’activités du groupe se porte bien.
L’arrêt du 22 décembre 2016 penche en faveur de cette dernière solution et rappelle que dans le cadre de la réorganisation ou de la restructuration d’une entreprise, il convient de s’en tenir au droit commun des licenciements économiques et de vérifier si la cause justificative du licenciement repose bien sur des difficultés économiques avancées ayant nécessité la réorganisation voire la restructuration et plus particulièrement la suppression du poste du salarié pour permettre la sauvegarde de l’entreprise.
Selon les juges, « Les difficultés économiques ne peuvent s’apprécier qu’au seul niveau de la société concernée (…) de sorte que le périmètre d’évaluation ne s’étend pas à l’ensemble du secteur d’activité du groupe auquel appartient la société en difficultés (…) ».
Il s’ensuit que l’employeur qui se base sur la situation déjà dégradée de son chiffre d’affaires au sein de la seule société concernée doit ainsi être admis à prendre les mesures qui s’imposent. À voir si ce courant jurisprudentiel sera confirmé.