Licenciement économique – suppression de poste

Si le chef d’entreprise est seul responsable du risque assumé, il bénéficie corrélativement du pouvoir de direction et il décide seul de la politique économique de l’entreprise, de son organisation interne et des modalités techniques de son fonctionnement qu’il peut à tout moment aménager à son gré et il n’appartient pas aux juridictions du travail de se substituer à l’employeur dans l’appréciation de l’opportunité des mesures prises quelles que soient les répercussions au regard de l’emploi. Le chef d’entreprise doit dès lors pouvoir
procéder aux mesures de réorganisation et de restructuration nécessaires au bon fonctionnement de l’entreprise, même si celles-ci nécessitent des licenciements avec préavis fondés, sauf au salarié licencié d’établir que son congédiement est sans lien avec la mesure incriminée et ne constitue pour l’employeur qu’un prétexte pour se défaire de lui.
Il n’est pas nécessaire que le chef d’entreprise justifie d’une exploitation déficitaire, mais il suffit que la suppression du poste soit réelle, le chef d’entreprise pouvant légitimement prendre des mesures pour rationaliser son exploitation en comprimant les frais et ceci, non seulement sous la menace d’éventuelles pertes.
Il devient, par conséquent, inutile d’examiner la situation comptable de la société SOC1.) et l’évolution de son résultat annuel (38.787,56 EUR au 31 décembre 2012 après neuf mois d’activités et 318.361,46 EUR au 31 décembre 2013) ainsi que la question de l’existence d’une unité économique et sociale formée par les sociétés SOC2.) et SOC1.).

 

 

L’appelante soutient d’abord que la lettre de motivation manquerait de précision pour défaut d’indication du nom de la société externe chargée d’établir les décomptes de salaires à la place d’A.) et de l’importance de l’économie réalisée grâce à cette mesure, pour ne pas avoir versé les bilans comptables cités dans la lettre de motivation et pour ne pas avoir précisé les difficultés d’organisation
mentionnées dans cette même lettre.

La Cour renvoie pour le détail à la lettre de motivation du 28 mai 2013 annexée au jugement du 16 novembre 2015.

Les éléments cités par l’appelante pour souligner l’imprécision de la lettre de motivation ne sont pas déterminants : certains concernent la question du bienfondé du licenciement, telles la production des bilans (entretemps versés) afin d’établir la situation financière déclinante de l’employeur ou l’économie effectuée par la suppression d’un poste de travail, d’autres, telle l’identité de la société externe ne sont que secondaires et peuvent être précisés ultérieurement. Quant aux difficultés d’organisation qui sont invoquées suite aux
absences pour incapacité de travail de la salariée et qui sont toutes énumérées dans la lettre de motivation, celles-ci sont présumées lorsque les absences sont nombreuses sans que l’employeur ne doive préciser davantage les inconvénients qu’elles ont causés au fonctionnement de l’entreprise.

Les motifs clairement exposés, avec chiffres à l’appui, dans la lettre du 28 mai 2013 répondent à suffisance de droit aux critères de précision requis par la loi pour permettre à la salariée d’apprécier s’ils ne sont pas illégitimes et de prouver leur fausseté et au juge de vérifier s’ils correspondent à la réalité. Le moyen du défaut de précision doit partant être rejeté.

A.) conteste ensuite le caractère réel et sérieux des motifs, notamment les difficultés économiques de la société SOC1.), sinon du groupe SOC2.), et, par incidence, la nécessité de supprimer son poste de travail.

Il se dégage de la lettre de motivation que face aux résultats commerciaux modestes de la société SOC1.), la résiliation du contrat de travail a été décidée dans le cadre d’une mesure de restructuration, la société employeuse voulant réduire le coût des travaux comptables et des travaux d’établissement des salaires des ouvriers occupés sur les chantiers effectués par A.) par l’externalisation de ces tâches et s’assurer, à la même occasion, l’exécution suivie de ces tâches, qui devaient être réparties entre les divers salariés de
l’entreprise lors des nombreux congés de maladie de la salariée. L’économie qui devait être ainsi réalisée est évaluée à près de 22.000.- EUR par an, ce qui représentait plus de la moitié du résultat réalisé par la société en 2012.

Si le chef d’entreprise est seul responsable du risque assumé, il bénéficie corrélativement du pouvoir de direction et il décide seul de la politique économique de l’entreprise, de son organisation interne et des modalités techniques de son fonctionnement qu’il peut à tout moment aménager à son gré et il n’appartient pas aux juridictions du travail de se substituer à l’employeur dans l’appréciation de l’opportunité des mesures prises quelles que soient les répercussions au regard de l’emploi. Le chef d’entreprise doit dès lors pouvoir
procéder aux mesures de réorganisation et de restructuration nécessaires au bon fonctionnement de l’entreprise, même si celles-ci nécessitent des licenciements avec préavis fondés, sauf au salarié licencié d’établir que son congédiement est sans lien avec la mesure incriminée et ne constitue pour l’employeur qu’un prétexte pour se défaire de lui.

Il n’est pas nécessaire que le chef d’entreprise justifie d’une exploitation déficitaire, mais il suffit que la suppression du poste soit réelle, le chef d’entreprise pouvant légitimement prendre des mesures pour rationaliser son exploitation en comprimant les frais et ceci, non seulement sous la menace d’éventuelles pertes.

Il devient, par conséquent, inutile d’examiner la situation comptable de la société SOC1.) et l’évolution de son résultat annuel (38.787,56 EUR au 31 décembre 2012 après neuf mois d’activités et 318.361,46 EUR au 31 décembre 2013) ainsi que la question de l’existence d’une unité économique et sociale formée par les sociétés SOC2.) et SOC1.).

La suppression du poste de travail est établie par l’attestation testimoniale de C.), épouse D.). D’ailleurs, A.) ne conteste pas autrement que son poste ait été supprimé et que les tâches qui lui étaient rattachées et qui n’ont pas été confiées à la fiduciaire SOC3.), ont été réparties entre les autres collaborateurs de SOC1.) S.àr.l.

Il s’ensuit que les motifs économiques invoqués par l’employeur à l’appui du licenciement avec préavis d’A.) sont réels et sérieux et justifient le licenciement intervenu. La demande de la salariée en indemnisation de ses préjudices matériel et moral n’est, par conséquent, pas fondée.

Le jugement entrepris est, partant, à confirmer pour ces chefs. (C.S.J., 17/05/2018, 43317).