Décès de l’employeur et sort des contrats

Aux termes de l’article L.125-1(1) du code du travail prévoit que « Sans préjudice des dispositions du chapitre VII ci-après, le contrat de travail est résilié avec effet immédiat en cas de cessation des affaires par suite de décès, d’incapacité physique ou de déclaration en état de faillite de l’employeur. En cas de transfert d’entreprise au sens des dispositions du même chapitre VII, les contrats résiliés renaissent de plein droit au moment de la reprise des affaires suite au transfert, dans les conditions visées aux articles L.127-3 à L.127-5. Dans cette dernière hypothèse, la reprise des affaires doit cependant intervenir dans les trois mois à partir de la cessation des affaires. Ce délai peut être prolongé ou réduit par la convention visée au paragraphe (2) de l’article L.127-5.

Sauf continuation des affaires par le curateur ou le successeur de l’employeur, le salarié a droit :

1)      au maintien des salaires et traitements se rapportant au mois de la survenance de l’événement et au mois subséquent et

2)      à l’attribution d’une indemnité égale à 50 % des mensualités se rapportant au délai de préavis auquel le salarié aurait pu prétendre conformément aux dispositions de l’article L.123-3. (…). »

Il en découle que, si au jour du décès de l’employeur, dès lors au jour de la cessation de ses affaires, les contrats de travail sont résiliés avec effet immédiat, force est cependant de constater qu’ils renaissent de plein droit dans l’hypothèse d’un transfert d’entreprise au sens des dispositions du chapitre VII du code du travail, donc d’une reprise d’activité soit par le curateur en cas de faillite, les héritiers du défunt ou par un tiers, transfert qui doit cependant intervenir dans un délai de trois mois à partir de la cessation des affaires.

En l’espèce et contrairement au soutènement de l’appelante, B1 a posé des actes concrets de nature à marquer son intention claire et non équivoque de ne pas reprendre l’activité de feu son époux, puisqu’elle a par courrier de son mandataire du 6 avril 2012, informé le Ministère des Classes Moyennes et du Tourisme, qu’elle n’entendait pas continuer l’entreprise de son époux et qu’il y avait cessation définitive des affaires. Par ailleurs, par arrêté du 6 avril 2012, le Ministère précité a annulé l’autorisation d’établissement délivrée le 16 novembre 2006 à B et le même jour, le mandataire de B1 a déposé une réquisition de radiation auprès du registre de commerce et des sociétés.

La Cour entend relever que l’article L.125-1(1) du code du travail prévoit expressément pour l’éventuel ou futur repreneur un délai de trois mois pour reprendre l’activité et faire renaître de plein droit le contrat de travail résilié avec effet immédiat du fait du décès de l’employeur, sans pour autant expressément qualifier juridiquement cette période, même si les salariés se trouvent toujours dans l’entreprise de l’employeur décédé et y effectuent encore leur travail.

En aucun cas le législateur n’a entendu conférer à cette période de trois mois, la nature juridique d’une relation de travail au sens du code du travail, de sorte qu’il y a lieu de considérer cette période comme une période de transition, d’attente nécessaire à la reprise éventuelle de l’activité pendant laquelle la salariée, qui prétend avoir travaillé jusqu’au 3 avril 2012, n’a fait que continuer les affaires encore en cours au moment du décès de l’employeur, même s’il s’agit, comme elle le prétend, de nouveaux achats, de nouvelles commandes … et non d’une continuation par l’épouse de B de l’activité de son époux au sens de du chapitre VII du code du travail relatif au transfert d’entreprise.

Il devient partant superfétatoire, en présence de la manifestation claire de B1, intervenue dans le mois de la survenance du décès de son mari, de ne pas reprendre les affaires de ce dernier, établissant à elle seule la non continuation des affaires par elle, de vouloir vérifier quels actes ont effectivement et réellement posés par B1 pendant cette période d’un mois tant à l’égard des salariés que par rapport à l’activité même de l’entreprise de son époux.

Il en suit encore et pour les mêmes raisons que ci-avant, que la demande formulée par A en communication d’une série de pièces, sous peine d’astreinte, est à déclarer non fondée.

C’est partant à bon droit que le tribunal du travail a décidé : « Au vu des de ces pièces et à défaut d’autres éléments, le seul fait qu’à la suite du décès de leur employeur en date du 10 mars 2011, les salariés sont restés sur leur lieu de travail jusqu’au 3 avril 2012, ne permet de conclure à une continuation réelle et effective par B1 de l’exploitation du commerce de feu son mari au cours de la période visée.

Et « qu’eu égard à ce qui précède, il y a a partant lieu de retenir qu’à défaut de preuve de la continuation des affaires de feu son mari par B1, le contrat de travail a pris fin de plein droit le 10 mars 2012, jour du décès de son employeur par l’effet des dispositions de l’article L.125-1(1) du code du travail et n’est pas rené par la suite ». 

L’appelante fait ensuite grief à la juridiction de première instance d’avoir décidé qu’aucun nouveau contrat de travail ne s’est formé entre les parties en date du 11 mars 2012, bien qu’elle soit restée à son poste de travail et a continué à travailler comme à son habitude, de sorte qu’elle soutient que dans pareille circonstance, il est plus qu’évident qu’elle a reçu des instructions et qu’il a existé un lien de subordination entre elle et B1.

La Cour reprend à cet égard les développements faits ci-avant dans le cadre de l’article L.125-1(1)  du code du travail pour dire qu’en présence de la manifestation claire et non équivoque de B1  de ne pas  reprendre l’activité de son mari, aucun nouveau contrat de travail n’a pu être conclu entre les parties.

Pour être complet, il y a cependant lieu de relever que le contrat de travail est défini comme la convention par laquelle une personne s’engage à mettre son activité à la disposition d’une autre, sous la subordination de laquelle elle se place, moyennant rémunération, avec la considération que pour qu’il y ait rapport de subordination juridique, il faut que le contrat place le salarié sous l’autorité de son employeur qui lui donne des ordres concernant la prestations du travail, en contrôle l’accomplissement et en vérifie les résultats.

Le lien de subordination ne se présumant pas, il incombe au salarié, partant à A, en présence des contestations de B1,  de prouver l’existence de ces caractéristiques.

Or, à aucun moment cette dernière ne prouve ni offre en preuve l’existence d’un lien de subordination entre elle et B1 pendant la période d’un mois allant du décès de B jusqu’au 3 avril 2012, les pièces versées aux débats à cet effet respectivement celles dont la communication est demandée sous peine d’astreinte n’étant pas pertinentes à cet égard.

C’est partant encore à bon escient que le tribunal du travail a retenu « à supposer que la salariée ait fourni une prestation de travail à la suite du décès de son employeur, elle ne prouve pas qu’un lien de subordination se soit formé entre elle et B1 et qu’elle ait agi sous les ordres et les instructions de cette dernière, de sorte qu’elle n’a a pas prouvé la formation d’un nouveau contrat de travail entre elle et WEBER à la suite du décès de B ».

Eu égard aux développements faits ci-avant, le contrat de travail de A  a pris fin avec effet immédiat en date du 3 avril 2012, jour du décès de B, et non comme le soutient la salariée, par un licenciement abusif. (C.S.J., 07/07/2016, 41203).